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Luigi PIRANDELLO

prix Nobel 1934


“pour son renouvellement hardi et ingénieux de l’art du drame et de la scène.”







Il était une fois, Pirandello, né dans le sud de la Sicile dans une banlieue d’Agrigente nommée Chaos… Ses géniteurs, riches propriétaires d’une soufrière dans la région, venaient de vivre l’aventure de l’unification italienne… La naissance de Pirandello s’inscrivait dans la période des lendemains de révolution ; l’effervescence qu’avait créée Garibaldi, céda la place au découragement et à la désillusion.


Pirandello aurait dû suivre la voie de son père et diriger à ses côtés la soufrière: signe de la fin de l’aventure révolutionnaire. Pourtant ce n’est pas ce qui arriva : péripétie.


Un personnage joua un rôle important dans la vie de l’enfant : sa servante, conteuse exemplaire, qui lui narrait les fables et légendes de sa contrée. Les mots l’attirent et le poussent dans le monde des romans et de la poésie. En 1880, installé avec sa famille à Palerme, il rédige ses premiers poèmes : balbutiements d’un être destiné à une vocation d’écrivain. Cependant, la distance avec son père se creuse et s’annonce irrémédiable. La figure du père tend peu à peu à s’effacer derrière celle d’une mère chérie adorée. Viennent les années qui suivent 1880 ; celles-ci sont décisives dans la vie de Luigi. Amoureux de sa cousine Lina, il songe un temps à l’épouser, et à rejoindre son père à la soufrière pour subvenir à ses besoins. La soufrière servira d’ailleurs de toile de fond à nombre de ses récits ultérieurs… Mais, Luigi est attiré vers un autre monde… Le mouvement vériste et les études littéraires accaparent son attention ! En 1887, il quitte Palerme et s’installe un an à Rome. La ville le déçoit, ce n’est que dans la pénombre des salles de théâtre qu’il parvient à jouir des trésors italiens : Il Nazionale, Il Valle, Il Manzoni… Ces lieux ont un effet magique et quasi-incantatoire, ils font jaillir en lui un sentiment étrange, « une excitation du flux sanguin à travers ses veines ». Puis, départ à Bonn, un an plus tard : c’est la rencontre avec le romantisme allemand, la filiation à Goethe, dont il traduit et adapte le recueil Les élégies romaines.


Les années de voyage l’ont transformé… À son retour, il rompt avec sa cousine, règle quelques affaires et repart à Rome, dont il redécouvre la saveur. Capuana, un intellectuel romain, l’encourage à écrire. En 1893, paraît L’écluse, et un an plus tard, son premier recueil, Le mal joyeux.
Etrangement, sa vie d’écrivain se lie dans le même temps à la vie matrimoniale ; il épouse au cours de la même année une demoiselle discrète et bien née. Sa femme ne comprend pas très bien ce qui se trame dans la tête de l’écrivain. Pourtant loin d’être un obstacle dressé entre lui et la littérature, sa femme semble avoir des vertus sur l’humeur de Pirandello ; celui-ci travaille de manière acharnée : romans, essais, débats, revues, dispense de cours à l’Institut… c’est le temps de l’effervescence intellectuelle avant le drame de 1903. La soufrière de son père s’écroule, tandis que sa femme sombre tout à coup dans la folie.


Effondrement moral, années noires, jusqu’à l’immersion dans le travail. La fin de l’état de crise correspond à la publication de Feu Matthias Pascal !
La guerre surprend le monde déjà fragile de Pirandello : son fils intègre les corps de l’armée, et sa femme est internée. Son fils revient, sa femme reste à l’asile. La violence intérieure de sa femme se conjugue à la crise morale du monde de ces années-là… Ces violences tourmentent l’homme mais font l’écrivain. Pirandello acquiert la notoriété avec le théâtre. Six personnages en quête d’auteur font le succès de Pirandello, en même temps qu’ils créent la polémique, opposant en deux camps Romains et Milanais. On passera les années du fascisme et l’affiliation de Pirandello au parti du Guide. En effet, ses liens avec l’idéologie défendue par Mussolini demeurent somme toute ambigus. Retenons plutôt sa consécration avec en 1934 l’obtention du Prix Nobel et la publication de son chef d’œuvre : Un, personne et cent mille.