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Anatole FRANCE

prix Nobel 1991


“Pour rendre hommage à sa brillante carrière d’écrivain, à la pureté artistique de son style, à sa généreuse humanité ainsi qu’au charme de l’esprit français.”



Anatole France, de son vrai nom Jacques Anatole François Thibault, naît le 16 avril 1844 à Paris. Sa famille est issue de la paysannerie de la Beauce. Son père, Noël France, d'abord sous-officier légitimiste, démissionne au lendemain de la Révolution de 1830. Il tient sur le quai Malaquais, à Paris, une librairie spécialisée dans les ouvrages et documents sur la Révolution française. Elle est fréquentée par de nombreux écrivains et érudits, comme les frères Goncourt. Élevé dans la bibliothèque paternelle, Anatole en garde le goût des livres et de l'érudition, ainsi qu'une connaissance approfondie de la période révolutionnaire qui deviendra l’arrière-plan de plusieurs de ses romans et nouvelles, dont Les Dieux ont soif.


D'abord poète et disciple de Leconte de Lisle, s'introduisant ainsi très jeune dans les milieux bibliophiles, il rédige ses premiers ouvrages : Les Poèmes dorés en 1873 et un drame en vers à la manière antique intitulé Les Noces corinthiennes en 1876. Ceux-ci sont imprégnés de l’influence parnassienne. Anatole France s'oriente tardivement vers le roman, publie Jocaste en 1889 et connaît son premier succès public à 38 ans avec Le crime de Sylvestre Bonnard, couronné par l'Académie française en 1881.


Il est nommé chevalier de la légion d’honneur en 1884. Il raconte des souvenirs d'enfance dans Le Livre de mon ami qui paraît l'année suivante.


Bibliothécaire au Sénat, il devient le critique littéraire de la prestigieuse revue « Le Temps » en 1887. Ses articles sont réunis dans « La vie littéraire » à partir de 1888. Il écrit également pour « Le Globe », «Les Lettres et les arts » et « la Revue alsacienne ». Plus tard, il participe à « La Revue des deux mondes » et « L’Echo de Paris ». Anatole France aspire à une vie bourgeoise, mais son mariage avec Valérie Guérin de Saville datant de 1887 s'avère désastreux, malgré la naissance de Suzanne la même année. En 1888, il rencontre Madame Arman de Caillavet qui tient un célèbre salon littéraire. Il quittera le domicile conjugal en 1892 pour vivre avec elle. Ce nouvel amour lui inspire Thaïs (1890), roman après lequel il quitte la bibliothèque du Sénat, et Le Lys rouge (1894). La rôtisserie de la Reine Pédauque, un roman picaresque à la manière de Lesage, dans lequel l’écrivain fait le récit des aventures trépidantes de Jacques Tournebroche, sort en 1893, suivi de Les Opinions de M. Jérôme Coignard et du jardin d’Epicure en 1894. Pendant ces années, Anatole France rédige également des contes. Deux recueils sont publiés : L’Étui de nacre en 1892 et Le Puits de Sainte-Claire en 1895. Au cours de ces années, Anatole France se réconcilie avec Stéphane Mallarmé et Paul Verlaine, deux poètes dont il avait refusé les œuvres en 1875 au Parnasse contemporain. 


Anatole France est élu à l'Académie française le 23 janvier 1896, au Fauteuil 38, où il succède à Ferdinand de Lesseps.


Écrivain reconnu, il rejoint Émile Zola lors de l'affaire Dreyfus dès le lendemain de la publication de « J'accuse ». Le 14 juillet 1898, il signe, quasiment seul à l'Académie française, la pétition demandant la révision du procès. Il rend sa Légion d'honneur après qu'on l'eut retirée à Zola et refuse longtemps de siéger sous la Coupole. Son engagement dreyfusard se retrouve dans les quatre tomes de son Histoire Contemporaine, chronique des mesquineries et des ridicules d'une préfecture de province au temps de l'Affaire. Ses oeuvres qui suivront, parmi lesquelles L'Affaire Crainquebille (1901), Sur la pierre blanche (1905), l'Ile des Pingouins (1908), la Révolte des Anges (1914), témoignent de ses engagements. Il participe aussi à la fondation de la Ligue des droits de l'homme.


En 1912, Les Dieux ont soif paraît : sous la Terreur, Évariste Gamelin, peintre médiocre mais défenseur exalté des idéaux révolutionnaires, est nommé juré au Tribunal révolutionnaire.


Écrivain humaniste, sceptique passionné, Anatole France s'engage pour la séparation de l'Église et de l'État, pour les droits syndicaux, contre les bagnes militaires. Ami de Jean Jaurès et de Francis de Pressensé, il s’inscrit au Parti Socialiste et continue à écrire pour l'Humanité dont il a été un des créateurs. Après le décès de son amie, Madame de Caillavet, le 12 janvier 1910, Anatole France erre dans sa vie amoureuse.


Alors que la guerre est déclarée, l’écrivain rompt avec le Parti socialiste, hostile à l’Union Sacrée. Il quitte Paris pour résider à la Béchellerie, près de Tours. Un article où il expose ses réserves vis-à-vis de la guerre, publié en 1914, suscite de vives critiques. Ses textes sont recueillis au mois de janvier 1916 dans La Voie glorieuse puis dans Ce que disent nos morts. Anatole France songe à s'engager, puis à se suicider. Mais il ne fera rien de tout cela. En 1919, il prend position contre le Traité de Versailles ("Contre une paix injuste", l'Humanité, 22 juillet 1919). Proche de la SFIO, il est plus tard critique envers le PCF.


Le 11 octobre 1920, Anatole France se remarie avec Emma Laprévotte, l’ancienne gouvernante de Madame de Caillavet. En 1921, il obtient le Prix Nobel de littérature pour l'ensemble de son œuvre. Alors qu’il s’est retiré du monde des lettres, il assiste à une manifestation publique donnée en son honneur pour son 80ème anniversaire, le 24 mai 1924, au palais du Trocadéro.


Il meurt le 12 octobre de la même année à Saint-Cyr-sur-Loire. Des funérailles nationales sont organisées le 18 octobre. Après sa mort, il est la cible d'un pamphlet des surréalistes. Proust fera de lui, sous le nom de Bergotte, l'un de ses personnages d’À la recherche du temps perdu.